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Voilà au moins la 3ème fois que je tombe sur un post dans les réseaux sociaux où s’expriment des dinosaures du coaching français (et pas n’importe lesquels). Ils sortent leur plume et s’insurgent devant tous les webébécoachs qui démarchent à tour de bras pour coacher des coachs qui ne trouvent pas de clients à coacher. Si c’est pas un scoop ça !?

Il semble bien, depuis quelques petites années, que les toutes nouvelles recrues formées au coaching dans les écoles spécialisées (elles poussent comme des champignons) se mettent à directement à coacher (closer?) des coachs. Et pour cause, ils sont nombreux ces nouveaux arrivés dans le developpement personnel qui n’arrivent pas à décoller de l’anonymat de la masse. La solution est toute faite, coacher là où la demande est forte : les coachs qui ne parviennent pas à se détacher du lot. Hélas, ce-ci n’auront d’autre recours que de coacher à leur tour de futurs coachs. Et la roue est ainsi lancée depuis quelques années…

Les thérapeutes ne sont pas en reste. La grande palette des métiers de l’accompagnement et du bien-être grenouille de tous les indépendants qui, après un ou deux burnout, se sont reconvertis et ne parviennent pas à vivre correctement de leur nouveau métier. Alors hélas ça barbotte dans la grande marre. J’ai vu l’eau stagner très vite dès 2010… Je suis sûre que beaucoup d’autres l’ont vu mais ont laissé passer cela sans mot dire histoire sans doute de ne pas s’y frotter pour ne pas avoir à regarder où ils en sont.

J’ai sûrement l’air cynique. J’en suis désolée car ce n’est pas dans ma nature mais, hélas oui, la réalité du coaching c’est qu’on n’en vit pas forcément bien ni tout de suite. J’ai mis 3 ans à être en mesure de gagner au moins l’équivalent du SMIC (on l’appelle encore comme ça ?), et sans garantie, d’un mois sur l’autre, d’encaisser des pépettes (c’est dire si le SMIC devient attractif !). Alors ça fait tout bizarre lorsqu’on tombe sur des offres fabuleuses qui promettent d’atteindre les 100K par mois en devenant coach.

Ils sont plus d’un à s’y précipiter sans connaitre la réalité du milieu. Poussés par l’appât de l’argent (soi-disant) facile (on ne s’étonne même plus !), l’envie de se sentir au-dessus du lot (et oui, on veut tous devenir un Jedi !), l’envie de régler ses comptes avec papa et maman (il faut bien gérer sa névrose en évitant le psy !), l’envie de faire comme son sophrologue mais pas tout à fait, et l’envie de quitter son job foireux, ou l’impossibilité de revivre l’enfer d’un burnout, les voilà qui se précipitent donc (pour beaucoup mais certes pas tous) dans des formations pleines de promesses.

Hélas, hélas… C’est en pleine figure que la réalité vient s’écraser… Car il est en réalité difficile d’être à son compte quand on n’a pas les codes du réseautage et de la débrouille pour trouver ses clients, ni la chance d’être naturellement doué sur le plan commercial. Déçus de constater la réalité ambiante, les petits nouveaux du développement personnel font à leur tour de belles promesses pour appâter le client qui aimerait bien, lui aussi, un chiffre d’affaire à la hauteur de l’investissement qu’il a mis dans toutes ses formations et ses ateliers.

C’est dans les années 2000 (histoire de faire croire que je suis déjà un dinosaure, MDR !) que m’a saisi l’envie de me reconvertir dans le métier de coach. A l’époque j’ai favorisé une transition lente et je suis restée dans mon poste de salariée. Il me plaisait et surtout me sécurisait. Pensez donc, un CDI super bien payé à l’approche d’un gros bug. Il faisait plus chaud dans le salariat que dans les coulisses du libéral. J’étais cependant terriblement attirée par le coaching.

J’ai beaucoup lu pour être sûre de savoir que c’était l’orientation que je voulais prendre avec finalement l’idée, non pas de me reconvertir mais d’intégrer le coaching dans ma fonction. Ce n’est que quatre ans après ma formation que j’ai compris au fil du temps que je n’arriverais pas en interne à occuper une fonction crédible pour aider et transformer ce qui s’invitait à l’être de plus en plus. Alors un beau jour, j’en ai eu marre d’espérer que l’entreprise m’offre ce rôle et j’ai décidé de partir. Ça tombait bien (loi de l’attraction ?), un PSE (plan de sauvegarde de l’emploi) se dessinait et j’ai sauté sur l’occasion pour me lancer. C’était en 2012.

Durant les 3 premières années de ma semi-liberté, j’ai beaucoup trainé des pieds, tentés des pistes, essuyé échecs et désillusions avant de commencer à comprendre qu’être “à son compte” était un métier, un vrai métier ; un métier sérieux qu’il fallait aborder avec l’implication, la pugnacité et la conscience de soi qu’il impose.

Je ne suis donc pas étonnée de voir les dérives qui se sont accumulées au fil de ces dix dernières années dans le monde de l’accompagnement. De belles promesses sur le papier ont fait beaucoup de déçus qui se sont reconvertis en experts de la réussite.

Avec leur casquette toute fraiche de coach, ils partent, boite à trucs et astuces sous le bras, « closer » maintenant les jeunes certifiés qui n’en ont pas encore fini de la checklist des formations qui alourdiront encore leur pile de méthodes, histoire de bien s’assurer qu’on a tout sous la main pour être un super coach qui va réussir.

Oui mais voilà, la base pour être un bon coach (on pourra même se passer du « bon ») c’est de coacher. Et de coacher comme un vrai coach et non pas de former à la démarche commerciale, au personal branding ou à la technique de croissance de son business. En fait, la grande difficulté c’est de rencontrer la demande telle qu’elle s’applique au coaching et de perdurer dans le métier.

Alors je trouve qu’ils ont raison ces dinosaures de prendre la plume et de s’insurger devant ce tout et n’importe quoi qui discrédite la profession et injecte de faux espoirs dans l’esprit de ceux qui sont en quête d’un job de rêve — qui, au demeurant, devrait plutôt se faire coacher que certifier !

Les fédérations ont beau afficher les chartes déontologiques en long et en large, personne n’y connait rien. Certains ingurgitent tout sans même prendre la peine de séparer le bon grain de l’ivraie quand d’autres crient à l’escroquerie comme Julie Jumper de Funès qui confond pratique et détournement de la pratique, et n’hésite pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Faut le faire !

La majorité de mes clients ne savent même pas qu’il existe des certifications et des fédérations qui régissent le métier. Comment s’étonner finalement que les médias (incapables aujourd’hui de prendre le temps d’investiguer vraiment) se jettent sur la chasse aux gourous ? Comment ne pas s’étonner qu’on confonde développement personnel, coaching, mastermind, masterclass, webinaires, closing, mentoring et tout le tralala, si les coachs ont quitté les cabinet pour monter sur scène ?

Critiquer tout cela pour critiquer n’a pas d’intérêt selon moi. Il me parait simplement bon de remettre la réalité sur l’écran, les justes mots à leur place et les coachs dans leur véritable posture.

En attendant, plein de Gourou-Luke ont refilé des sabres lasers à tout le monde sans que personne ne sache maîtriser la Force. C’est ballot quand même !